Tunis, 2 avril (Avec TAP) – Ainsi, à Nabeul, Sousse et Siliana, des conducteurs de camions de transport de marchandises ont fermé mardi, l’entrée de la ville de Grombalia au niveau de l’autoroute Tunis, Hammamet. A Djerba, des propriétaires de taxis et de voitures de louage ont également mené un mouvement de protestation dans les différents croisements de l’île touristique. Plusieurs localités du gouvernorat de Monastir ont connu des mouvements semblables depuis lundi. Un jeudi « chaud » s’annonce cette semaine avec le sit-in qui sera organisé devant l’ARP, par l’Union Tunisienne de Taxi individuel.
La dernière décision du gouvernement d’augmenter les prix des hydrocarbures annoncée le week-end dernier, sans crier gare, a suscité un tollé tant parmi les organisations patronales professionnelles que les citoyens. Cette décision, qui a engendré des protestations qui vont crescendo, depuis lundi, prouve, selon l’économiste Aram Belhadj, que « le gouvernement est dans une incapacité remarquable devant les dossiers brûlants du pays ».
La majoration des hydrocarbures a porté sur une augmentation de 80 millimes aux niveaux de l’essence sans plomb (super) et du gazoil sans souffre et de 90 millimes pour le gazoil ordinaire. Le litre de ces produits se vend désormais, respectivement, à 2065 millimes, 1825 millimes et 1570 millimes.
Communication défaillante
La décision est intervenue au moment où le regard d’une bonne partie de l’opinion publique tunisienne était braquée sur le sommet arabe de Tunis (31 mars 2019). Le communiqué relatif à cette majoration a été diffusé par le ministère de l’Industrie, des petites et moyennes entreprises (PME) samedi, peu avant minuit.
Le ministère s’est contenté de noter que la majoration est due à « l’augmentation continue des prix du pétrole et ses dérivés sur le marché mondial, avec un prix du baril du pétrole brut dépassant dernièrement, les 68 dollars » et qu’elle est prise « sur la base du mécanisme de régulation périodique des prix des carburants en vigueur depuis juillet 2016 ».
Peu de temps auparavant, le chef de ce département Slim Feriani s’est exprimé au nom du gouvernement pour démentir toute augmentation dans ce domaine. « Le gouvernement n’envisage pas une augmentation des prix des carburants, contrairement à ce que plusieurs médias ont relayé », a-t-il déclaré, en marge d’une journée d’étude organisée, le 5 mars, au siège de l’UTICA, sur le thème « Coût de l’énergie pour les entreprises économiques ».
« Parler d’augmentation des prix des carburants n’est qu’une rumeur », a-t-ll insisté, d’autant que « 2,8 milliards de dinars ont été mobilisés dans le cadre du budget de l’Etat pour l’exercice 2019 pour la compensation des hydrocarbures contre 2,7 milliards de dinars en 2018 ». Il a précisé que le gouvernement a eu recours, l’année dernière, à l’augmentation des prix des carburants, suite au doublement des cours de pétrole sur le marché international à 80 dollars contre 40 dollars le baril en 2017. Il a tenu les mêmes propos dans une autre déclaration le 21 mars, sur Radio Shems Fm, au risque de discréditer encore toute l’action gouvernementale.
A son tour, le chef de gouvernement Youssef Chahed vient de déclarer, mardi, aux médias qu’« il demeure compréhensif quant aux contestations de la décision de majoration. » Le gouvernement est obligé de prendre une telle mesure, le pays souffrant désormais « d’un déficit énergétique », a-t-il dit.
Cependant, pour l’universitaire Aram Belhadj, « cette mesure prouve que le gouvernement est dans une incapacité remarquable devant les dossiers brûlant du pays. Sinon, pourquoi annonce-t-on quelques jours plus tôt que le gouvernement n’a pas l’intention d’augmenter les prix des hydrocarbures, pour y procéder tout de suite après, au contraire? N’était ce pas là un signal destiné à l’équipe du FMI présente en Tunisie? », a-t-il dit, à l’agence TAP .
En effet, la décision gouvernementale a été prise au moment où une équipe du FMI séjournait dans le pays « pour négocier le paiement de la 5ème tranche du prêt contracté » auprès de l’institution financière internationale, une « coïncidence » que de nombreux Tunisiens n’ont pas manqué de souligner sur les médias sociaux. Quant aux explications du gouvernement, elles sont intervenues après le rejet de la majoration affiché par la plupart des organisations professionnelles et par des partis politiques de l’opposition.