Laurent Caizergues, conseiller Consulaire Tunisie-Libye, à Ambassade de France en Tunisie, de la circonscription Tunisie-Libye, a posté ce matin sur son compte Facebook la triste histoire d’une expatriée mariée à un Tunisien hospitalisée dans une clique privée suite à un « énième AVC », selon M. Caizergues. Cette histoire d’une extrême brutalité peut provoquer chez quelqu’un jaillissement de colère couplé une fureur incontrôlable, mais également met en lumière la vulnérabilité de ces femmes étrangères amoureuses du pays et prêtent à tous sacrifier.
Alerté depuis quelques mois, Laurent Caizergues a été appelé hier soir par une compatriote qui vit un véritable cauchemar. Cette femme a quitté la France, il y a quinze ans par amour comme bien d’autres avant elle, la trentaine à peine entamée, sans un seul moment penser que l’idylle ne durait qu’un temps. Pour s’adapter à sa nouvelle vie, son nouveau pays et à sa belle-famille, cette femme accepta de subir une violence psychologique puis physique qui fût en permanence suivi d’un chantage affectif. La situation ne s’améliora pas malgré l’arrivée de deux enfants, précise ce conseiller engagé dans la communauté des expatriés français en Tunisie.
C'est honteux !
Publiée par Laurent Caizergues sur Jeudi 28 novembre 2019
« À cette situation déplorable vint s’ajouter l’isolement : chambres séparées, sorti en solitaire du mari avec ses amis, découchages réguliers sans explications. À bout, elle demanda une première fois le divorce, puis une seconde pour arriver à sept demandes en tout. Elle ne trouva pas la force d’aller au bout face aux menaces de la belle-famille et aux coups portés par le mari. Le sort continua à s’acharner sur elle avec un premier AVC à 40 ans puis de multiple autres en 4 ans, seule en Tunisie sans le soutien de sa famille d’adoption. Après être passée près de la mort, elle décida enfin de reprendre sa vie en main et d’aller au bout de la procédure de divorce il y a un an et demi afin de protéger ses enfants qui subissaient eux aussi cette pression psychologique et familiale, » ajoute M. Caizergues.
« Très vite, un lynchage s’engagea et elle se vit menacée de mort si elle n’acceptait pas de tout laisser derrière ainsi que ses enfants. Elle trouva face à elle une justice partiale rangée du côté du mari tunisien du fait de sa nationalité. Des forces de l’ordre appliquant des décisions de façon arbitraire quand cela arrange la partie adverse. »
Ce monsieur, qui se dit par ailleurs insolvable, est représenté par 6 avocats et cherche par tous les moyens à la faire craquer en essayant de la faire incarcérer malgré son état de santé fragile ce qui pourrait lui être fatal, sans aucune retenue pour ses enfants qui ne supportent plus les menaces de mort de leur papa envers leur maman.
Je pensais à tort que la Tunisie protégeait les femmes. Mais cette histoire jette une toute autre lumière.
Le comble de l’affaire étant la mystérieuse réouverture du dossier classé en 2018 ayant abouti à un mandat d’arrêt prononcé mercredi dernier contre cette dame. J’étais hier à son chevet d’hôpital, des suites d’un énième AVC dont il me paraît évident qu’il est dû à cette menace d’incarcération.
Dans cette société si particulière en région méditerranéenne qu’est la Tunisie, il me semblait pourtant que la femme et la mère méritaient respect et protection.
Joint au téléphone par notre rédaction, M. Caizergues nous a confié avoir été contacté par Mme Neziha Laabidi, la Ministre de la Femme, de la Famille, de l’Enfance et des seniors cherchant à en savoir plus sur cette affaire.
Une loi « historique » votée en juillet 2017 en Tunisie renforce la protection des femmes victimes de violences et abolit des dispositions rétrogrades, comme la possibilité pour un violeur d’épouser sa victime mineure pour éviter les poursuites.
Sur les cinq dernières années, seulement 13% des affaires de violences domestiques ont aboutis à une arrestation et 0,9% à une peine de prison, d’après le Woman Migrants Human Rights Center (Centre des Droits Humains pour les Femmes Migrantes).
Les violences faites aux femmes sont très courantes en Tunisie, mais les victimes peinent à aller porter plainte ou à rendre la chose publique à cause du jugement de l’autre mais aussi d’un système judiciaire défaillant où les victimes de violences conjugales peuvent être poursuivies pour diffamation.