Il y a quarante ans en Argentine, la Tunisie devenait la première nation africaine à remporter un match de Coupe du monde, succès qui a permis à ce continent de bénéficier d’un deuxième représentant pour l’édition suivante.
Lundi face à l’Angleterre, tout le pays attend que les « Aigles de Carthage » répètent l’exploit du 2 juin 1978, quand leurs aînés avaient battu le Mexique (3-1) au premier tour du Mondial.
« Malahamet al Argentine » (le triomphe d’Argentine, en arabe), c’est ainsi que les Tunisiens désignent ce match, gravé dans toutes les mémoires comme signe d’une grandeur passée et jamais égalée. Depuis, les « Aigles » n’ont plus gagné une rencontre de Coupe du monde, malgré des participations en 1998, 2002 et 2006.
« Imagine, 40 ans après, les Tunisiens parlent encore de notre victoire », s’enthousiasme Mokhtar Dhouib, un défenseur auteur du troisième but contre le Mexique. A 66 ans, il se souvient avec émotion du « moment clé: l’entraîneur Abdelamjid Chetali est entré dans le vestiaire et nous a dit, des millions de Tunisiens attendent la victoire, en nous lançant le drapeau, avant de sortir ».
« Lorsque le président Habib Bourguiba nous a reçus ensuite, il nous a dit que nous avions fait le travail de 50 ambassadeurs», explique à l’AFP M. Dhouib. Leur entraîneur les avait surnommés les « soixante-dix-huitards », en référence aux « soixante-huitards français de mai 1968 ».
De fait, « cette équipe qui regroupait de grandes stars et des amateurs était la seule lueur d’espoir après la crise économique, sociale et politique de janvier 1978 », souligne le journaliste, Sami Akrimi. La répression brutale d’une grève générale et d’un important soulèvement populaire avait fait de nombreux morts.
Cette victoire tunisienne a poussé la Fifa à accorder un deuxième quota à l’Afrique pour le Mondial-82 en Espagne. Ce fut l’une des étapes « qui ont mené le continent (africain) de la pauvreté footballistique à la cour des grands », souligne la Fifa sur son site internet.
Et lors du Mondial-82, les bonnes performances de l’Algérie (victoire contre l’Allemagne) et du Cameroun (match nul contre l’Italie, future championne du monde) ont débouché sur l’ajout d’un troisième quota pour l’Afrique. Aujourd’hui, ce sont cinq équipes africaines qui participent à chaque édition.
Le Maroc a été la première à passer le 1er tour, en 1986 au Mexique, et le Cameroun la première à atteindre les quarts de finale, en 1990 en Italie. Mais aucune équipe africaine n’a encore atteint les demi-finales.
Aujourd’hui, Mokhtar Dhouib veut « croire qu’il y a une possibilité de rejouer le scénario de « l’Argentine », même si la Tunisie (21e au classement Fifa) ne part pas favorite dans le groupe G (Angleterre, Belgique et Panama). « On peut créer la surprise si on joue avec notre style tunisien, africain », assure-t-il. « Les joueurs africains, avec leur technique et leur savoir-faire, jouent pour le jeu et la joie, et c’est comme ça qu’ils peuvent gagner ».