New York, — La démission du Premier ministre, Elyes Fakhfakh, le 15 juillet, soulève le risque d’une nouvelle impasse politique qui retardera encore les réformes et entravera les efforts pour convenir d’un nouveau programme avec le FMI, selon l’agence de notation financière internationale, Fitch Ratings.
Fitch: Tunisia’s Political Instability Raises Sovereign Financing Risks https://t.co/5ONSmuGOXZ
— african markets (@African_Markets) July 22, 2020
Bien que la Tunisie soit confrontée à des pressions financières immédiates, sa position de financement deviendra beaucoup plus compliquées en 2021 sans le soutien qu’un accord du FMI apporterait.
La démission du Premier ministre reflète les défis à la stabilité du gouvernement découlant d’un environnement politique instable, dans le contexte de la transition démocratique de la Tunisie. Le parlement qui a été élu en octobre 2019 est très fragmenté, ce qui complique la formation d’une majorité au pouvoir cohérente – après les élections, il a fallu attendre février pour que le parlement approuve un nouveau gouvernement.
Les tensions entre les participants influents se sont accrues ces derniers mois, notamment entre le parti islamiste Ennahda, majoritaire au parlement, et ses anciens partenaires de la coalition gouvernementale.
La formation d’un nouveau gouvernement dans ce contexte sera difficile. La base de soutien de toute future majorité au parlement sera hétérogène et fragmentée, ce qui limitera sa capacité à mettre en œuvre la législation, et le risque d’élections anticipées persistera.
L’impasse politique retardera l’approbation des réformes et soulèvera des risques importants autour de notre hypothèse d’un accord sur un nouveau programme du FMI avant la fin de 2020. Un accord avec le FMI est nécessaire pour débloquer un certain soutien des créanciers officiels, dont 600 millions d’euros (2 % du PIB) prêt de l’UE.
La mise en œuvre des réformes dans le cadre de tout nouveau programme du FMI sera difficile face à l’opposition sociale et syndicale persistante, ainsi qu’aux troubles populaires aggravés par les retombées économiques de la pandémie de coronavirus. Nous prévoyons une contraction de 6% du PIB en 2020 – la plus forte jamais enregistrée.
« Nous attendons toujours du gouvernement qu’il soit en mesure de couvrir ses besoins de financement en 2020 avec le soutien des créanciers officiels, même sans nouveau programme du FMI. (Ce soutien comprend cependant un prêt d’urgence de 745 millions USD du FMI, approuvé en avril.), » ajoute le communiqué.
La Tunisie devra faire face à un déficit de financement budgétaire d’environ 4 milliards TND (1,3 milliard USD, soit 3,6% du PIB) en 2020, selon nos estimations, reflétant notre prévision révisée d’un déficit de l’administration centrale de 7,6% du PIB en 2020, contre 3,9% en 2019. Le solide soutien officiel des créanciers à la Tunisie a joué un rôle important dans l’équilibrage des vulnérabilités externes résultant des importants besoins de financement du pays.
La position de financement de la Tunisie deviendra beaucoup plus difficile après 2020, en particulier en l’absence d’un nouveau programme du FMI. Le pays est confronté à une dette extérieure de 2,2 milliards USD à échéance en 2021, dont deux obligations garanties par l’USAID, d’une valeur de 500 millions USD chacune. Signe des pressions croissantes sur les liquidités, le gouvernement sortant a indiqué qu’il avait entamé des pourparlers avec plusieurs créanciers bilatéraux pour rééchelonner les remboursements de prêts dus cette année.
La Tunisie a 500 millions de dollars de remboursements de sa dette bilatérale à échéance en 2020 et n’est pas éligible à un allégement au titre de l’Initiative de suspension du service de la dette du G20.
L’exposition de l’État au stress de financement extérieur est amplifiée par le fait qu’environ 73% de la dette publique était libellée en devises à fin 2019. Les pressions à la baisse sur le dinar devraient réapparaître étant donné le large déficit courant de la Tunisie, à notre avis, bien que les réserves de devises du pays, d’environ 7,6 milliards USD, à fin juin, devraient apporter un certain soutien au taux de change.
À court terme. Nous avons souligné le risque de détérioration des conditions de liquidité externe comme une sensibilité négative pour la note souveraine lorsque nous avons abaissé la note de la Tunisie en mai à «B» avec une perspective stable, de «B +» avec une perspective négative.