Je vois déjà des flèches aiguisées et orientées vers ma poitrine car j’ai associé Mme Moussi à la démocratie. Tant pis, je n’ai pas pour habitude de m’exprimer suivant les envies des uns ou autres, j’assume donc et je garde ma liberté de penser même si elle déplait.
Abir (plus que son parti) est une vraie opposante aux islamistes. Elle le dit haut et fort et le manifeste avec éclat à chaque prestation au parlement et dans la presse. Elle ose défier Ghannouchi, contraire à beaucoup de personnes dans la maturité testiculaire n’est toujours pas arrivée, et elle lui dit ses quatre vérités en face.
Ensuite, Mme Moussi représente une certaine frange de la population tunisienne qui a été longtemps trainée dans la boue suite à la révolution confisquée et censurée par les hypocrites d’Allah et ses nouveaux convertis. Parce que Madame Moussi est au parlement, les lois se discutent et le « ouiouisme » se réduit. Elle suscite aussi des vocations et participe au réveil de certaines consciences.
La « zaghrata », je trouve ce surnom affectueux et je le préfère aux noms d’oiseaux attribués aux députés tristes travaillant pour mondial Circus et accessoirement nettoyeurs des bottes d’Erdogan, a un discours homogène, bien construit, on peut ou on ne peut pas y adhérer, qui pousse à réfléchir et à se poser les bonnes questions. Son argumentaire elle le puise dans la lecture de la constitution et non dans les dérives et les interprétations religieuses.
Pour ses opposants et détracteurs, plus envieux que convaincus, elle représente l’ancien régime et cherche à le ressusciter pour installer une nouvelle dictature en Tunisie. Ils oublient que plusieurs d’entre eux étaient la cheville ouvrière de Ben Ali et continuent a jouer le même rôle sous d’autres cieux par opportunisme, médiocrité et avidité. Abir Moussi est essentielle pour la démocratie et les démocrates en Tunisie car elle empêche de tourner en rond et dépoussière le suivisme et la soumission.
Pour ma part, j’appelle à regarder Abir Moussi pour ce qu’elle dit et représente aujourd’hui et non pour son passé (Jospin était trotskiste avant de devenir le Secrétaire Général du PS et le Premier Ministre de la France). Il faut se résoudre à l’évidence que l’ère Ben Ali est définitivement révolue et tous ceux qui l’évoquent aujourd’hui ne font que confirmer leurs échecs quant au choix d’une nouvelle politique et d’un nouveau projet sociétal!
Ce n’est pas en s’alliant contre Mme Moussi que l’on gagne ses galons de patriote et de « révolutionnaire » mais en la protégeant et en la laissant s’exprimer dans le cadre de la loi et des institutions de la République.
Par Ali Gannoun, professeur à l’Université de Montpellier